Trois
ans après leur dernier effort discographique, Bert Lenaerts, Mauro
Pawlowski, Rudy Trouvé et Craig Ward ressuscitent The Love Substitutes
le temps d’un concert exceptionnel à Anvers. Le Bar Mondial qui les
héberge développant une surface totale n’excédant guère les 60 m2, cela
laisse peu d’espace, à la fois aux 4 musiciens qui semblent tout de
même bien à l’étroit sur ce petit estrade haut de 50 cm, et au public
qui se presse dans une chaleur suffocante. Quelques
amplis, des câbles partout, une dizaine de spots au maximum et des
rideaux tirés devant les fenêtres, cela fait furieusement penser à
l’époque où les concerts étaient organisés de façon très « artisanale »
mais avec âme, à mille lieux de ces logistiques plus proches de
l’industrie que du spectacle vivant dont nous sommes coutumiers
aujourd’hui. Il est bon de rappeler qu’il ne faut pas grand-chose,
finalement, pour produire du bon son ! 40°,
c’est au bas mot la température qu’il fait sur scène ; dans la salle,
c’est probablement un peu plus. Résultat : la sueur dégouline sur tous
les visages dès les premiers accords. Ces conditions éprouvantes
n’empêchent pas la formation de délivrer une prestation décapante,
véritable concentré d’énergie brute, faite d’un rock sauvage qui lorgne
sérieusement du côté du punk voire du hardcore parfois, dans ces accès
les plus furieux. Les salves de guitare abrasives de Rudy, les lignes
de basse brûlantes de Bert, les tricotages saturés de Craig et les
expérimentations ingénieuses de Mauro, qui démontre qu’un batteur de
rock ne se limite pas forcément à reproduire à l’infini le bon vieux
jeu binaire charleston – caisse claire – grosse caisse… tout y est ! Et
le plaisir de jouer, bien sûr ; c’est là d’une évidence criante. En
un peu plus de 90 minutes, les 4 complices construisent un set qui
tient plus de l’improvisation concertée en fonction des envies de
chacun que du concert au sens où on l’entend habituellement. Inutile de
préciser que cette spontanéité, ce condensé d’esprit rock, participent
très largement de la qualité de la performance délivrée. Le
public, plus invité que spectateur, ne s’y trompe pas et ne laisse pas
ces 4 substituts à l’amour partir comme ça. Le Bar Mondial est alors
une véritable cocotte minute portée à pleine pression, mais qu’importe,
nous aurons droit contre toute attente à un rappel. Ce qui prouve que
l’on peut fouler les scènes les plus prestigieuses et jouer parfois
devant plusieurs dizaines de milliers de personnes (cf. Mauro Pawlowski
en tant que guitariste de Deus) et continuer à apprécier malgré tout le
plaisir simple et le confort très relatif d’un petit bistrot
d’habitués.
Une bien belle soirée ! Olivier Bodart
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